En 1982, les Métis furent reconnus par la section 35 de la constitution canadienne, à même titre que les Premières Nations et les Inuit. Cependant, aucune définition de ce qu’est un Métis fût incluse, ce qui mènera à devoir se fier au juridico-légal afin d’essayer d’élucider une définition sur l’identité métisse.
Dans notre petite communauté ayant pris naissance près de la rivière du Chicot, on se dit Métis. Nos premiers ancêtres fûrent rassemblés par les Jésuites aux Trois-Rivières. De prédominance de la Nation Anicinaabe – que les Jésuites nommèrent Algonquins, nos ancêtres avaient été attirés par l’éducation et la sécurité des remparts que les Français avaient érigés autour du village.
Le Gouverneur Charles Huault de Montmagny, appelé Onontio avait cédé, à l’usage des Algonquins, un terrain d’un front de quatre perches et d’une profondeur de huit, voisin de celui des Jésuites où devait être bâtie l’église. Le Gouverneur Louis d’Ailleboust de Coulonge l’a agrandi et la terre a été appelée le fief de Pachirini. Cependant, après le décès de Pachirini, le Gouverneur Louis-Hector de Callière arracha le fief à la Nation Anicinaabe, et Seigneurie de Sillery à la Nation des Wendats, pour les remettre aux Jésuites. Ce contrat, signé en 1699, fût exécuté sans le consentement ni en la présence d’aucun représentant des Anicinaabe ni des Wendats.
Mais où étaient partis les Anicinaabe?
En 1701, à peine 2 ans après la perte du fief de Pachirini, Antoine de la Mothe Cadillac employa les descendants du fief afin de faciliter la création du poste de traite au Fort Pontchartrain, maintenant nommée Detroit.
En consultant les registres de naissance ainsi que le registre des contrats de diverses compagnies de la traite des fourrures, on comprend rapidement que les descendants de Anicinaabes des Trois-Rivières avaient été engagés comme Voyageurs. Les Français avaient profité de l’éducation donnée aux Anicinaabe ainsi que leurs contacts familiaux afin de faire l’expansion des routes de traite.
Quelques décennies plus tard, des 1727 Pierre Gaultier de Varennes et de la Vérendrye employa les descendants des descendants des Anicinaabe afin d’implanter un important réseau de forts et de postes de traite, notamment au Manitoba, et noue des relations diplomatiques avec de multiples Premières Nations.
Peu de temps plus tard, nous constatons le retour de ces Voyageurs, accompagnés de leurs épouses et d’enfants. On peut voir aux registres de notre communauté des baptêmes d’enfants, nés de pères chrétiens et de mères de diverses Premières Nations tout au long des forts et postes de traite. Ces enfants sont baptisés avec comme seul surnom: Mitif et Mitive.
Nos ancêtres Anicinaabek et Wendats, se promenaient de poste en poste. Le succès économique des riches marchands de fourrure est grâce aux liens familiaux de nos ancêtres, tissés par unions et naissances et répandus d’un poste de traite à un autre au gré des Compagnies des Cent-Associés, du Nord-Ouest et de la Baie d’Hudson.
Après la tombée de la demande européenne des fourrures pendant prèsde 10 générations, nous avons perdu l’emploi que nous avions entrepris, forçant plusieurs familles à abandonner leur existence semi-nomade. Cependant, un retour sur les terres ancestrales n’était pas évident et se coïncide avec les changements apportés par les Brittaniques: fin du régime seigneurial, municipalisation des paroisses, vente de lopins de propriété avec conditions agricoles.
Nous étions cependant débrouillards; des compagnies avaient commencé l’exploitation forestière afin de combler le besoin grandissant de maisons et d’édifices pour accueillir les immigrants venant du Royaume Uni. Dès le milieu du 19e siècle, nous sommes devenus des “Shantymen”, terme en langue Anglaise désignant les hommes de chantier en Hiver.
Dès 1858, s’ajoute une nouvelle vocation: Guides de chasse. Le gouvernement fédéral avait adopté une loi accordant des droits de pêche qui pouvaient être loués par le ministre pour une période de neuf ans, créant des clubs privés appartenant à des riches Américains. En 1899, les clubs privés sont au nombre de 30, en 1914, de 70 et en 1941, de 614. En 1965, il existe plus de 2000 clubs privés au Québec employant Métis et Premières Nations jusqu’au déclubage en 1977.
Nos ancêtres s’étaient bâti des camps sur ces territoires non-organisés durant cette période, que ce soit pour bûcher ou en tant que guide. Ces camps étaient des abris faits en bois ronds, isolés avec de l’étoupe confectionnée à partir de crinière de cheval, mousse et bouette. C’est certain qu’on passe du temps à récolter pour nos familles et on a tous des lignes de trappe pour combler nos fins de mois. On nous laissait faire, parce que le gouvernement et les entreprises avaient besoin de nous…
Après le déclubage, la gestion de territoires fauniques fût confiée à des organismes à but non lucratif supposément pour rendre la forêt accessible à tous. C’est à partir de ce moment que les zecs (zones d’exploitation contrôlées) ont vu le jour.
À ce moment, les choses commencent à se compliquer. Tous les chasseurs et les pêcheurs doivent déclarer leurs prises; les lignes de trappes sont distribuées sous bail de droits exclusifs de piégeage. Le tout est géré par des organismes gouvernementaux. Aucune Première Nation, ni aucune communauté Métis sont consultés.
Cette époque coïncide avec l’avènement d’organisations luttant pour les Métis et les Premières Nations sans statut. Une des première inquiétudes était justement la perte de notre de nos moyens de subsistance. Nos relations avec les Premières Nations inscrits sous la loi des Indiens depuis 1869 étaient jusqu’à présent basées sur la réciprocité. Nous entrions sur leur territoire sans faire aucunes reclamations.
Dans ma famille, on se dit Métis. Jeune, mon grand-père me disait que c’était comment on faisait la différenciation entre notre vécu nomade et la sédentarisation forcée des Premières Nations avoisinantes. Nous avons développé des traditions et une culture très différente, ayant adopté certaines coutumes puisées de toutes les Nations – incluant les Français et Écossais – dont nous sommes issus.
Mais aujourd’hui, le juricico-légal canadien, établi par des douzaines de causes en Cour, dicte qu’une Nation ou une communauté autochtone se doit d’avoir un lieu géographique déterminant et déterminé par l’autorité gouvernementale canadienne et/ou provinciale.
Ça nous laisse où, nous?
Faudrait-il qu’on revendique le territoire de nos ancêtres Anicinaabeg? Il me semble que c’est vers cette direction que la jurisprudence nous mène.
En effet, nos ancêtres avaient négociés avec les Nations avoisinantes selon ces correspondences de 1829, montrant la Nation des Algonquins de Trois-Rivières revendiquer le territoire:
- à l’ouest de la rivière Ste-Anne-Lapérade,
- à l’est de la rivière et lac Maskinongé,
- au nord du Saint-Laurent en passant par Coucoucache jusqu’au limites de La Tuque et Poste du Roi appartenant à la Nation Atikamekw.

Voici le sommaire de la rencontre entre les Chefs des Nations des Algonquins, Abénakis et Wendat donnant raison sur la délimitation territoriale de la Nation des Algonquins de Trois-Rivières. Les documents originaux sont en ma possession:




À quel point étions-nous plutôt Métis que Algonquins? À quel moment pouvons-nous determiner l’ethnogénèse de notre Peuple, fondé par nos ancêtres engagés comme Voyageurs qui ont développé une culture et des traditions distinctes, imprégnées par les rencontres avec diverses Premières Nations avec qui nous vivions temporairement. Nos ancêtres ont marié des femmes de ces Nations et se sont marié entre eux et nous avons été élevés dans un mélange de cultures et traditions tout en créant culture et traditions propres à nous et différentes des québécois et immigrants.
Mais est-ce équitable? Devons-nous nous plier à la jurisprudence? Devons-nous nous résoudre à accepter avoir été absorbés par les Blancs et accepter aussi que notre Histoire soit effacée? Devons-nous nous plier à l’appropriation de ce que nous sommes – Métis – car ce mot descriptif se veut désormais exclusif à ceux des autres provinces?






































